Vous reprendrez bien une Madeleine ?

Le long chemin que nous parcourrons ensemble depuis quelques longues journées de confinement me fait penser à un marathon insensé pour lequel nous ne nous étions pas entrainé et dont nous voulons terminer absolument le parcours. Terminer le parcours pour en avoir la fierté car il ne s’agit pas de la moindre des épreuves mais aussi pour en tirer les leçons et, enfin, envisager l’avenir. Un avenir bâti sur l’expérience.

Cette aventure de vie m’a donné envie de relire un livre. Non pas « La peste » de Camus mais un récit, un témoignage romancé publié en 1968 par Bernard Clavel ; « Victoire au Mans ». Bernard Clavel, est un écrivain français principalement connu pour ses romans, mais qui s’st aussi adonné à l’écriture d’essais, de témoignages, de poèmes et de nombreux contes pour la jeunesse. Il a obtenu le prix Goncourt en 1968 pour « Les fruits de l’hiver ».
Né dans une famille modeste du Jura, il devient apprenti pâtissier à 14 ans et se forme en autodidacte en exerçant différents métiers avant de devenir journaliste dans les années 50. Il gardera en mémoire, ses racines « couleur terroir » pour concevoir son œuvre et cultivera l’art inné de raconter, de transcrire le vécu, le ressenti de ceux qui l’observait.

J’étais un jeune ado quand, un peu forcé par mon prof de français, j’ouvris ce livre pour la première fois. Passionné de sports moteurs bien plus que de littérature, le titre m’avait attiré. «Victoire au Mans » allait me captiver et m’apprendre ce que je n’y attendais pas, à commencer par l’amour des histoires vraies et de les raconter à mon tour.

Admis au sein d’une équipe de coureurs et de mécaniciens, Bernard Clavel raconte la plus célèbre course du monde, non pas en spécialiste mais en homme qui a découvert là un
univers exaltant, un métier de rigueur et de passion, une camaraderie née des joies et des angoisses partagées.
L’équipage suivi par l’auteur doit finalement abandonner la course à la dix-septième heure. Cet un échec, pas une victoire. Sur le plan sportif, oui. La modeste Alpine bleue et son équipe n’auront pas brillé sur le podium mais l’aventure humaine constitue le fruit d’une expérience à nulle autre pareil. Une expérience douloureuse à certains égards et qui surtout, donne une furieuse envie de recommencer à rêver à une possible victoire, à un grand matin de printemps ou tout semble à nouveau possible…

En ce matin frisquet où je termine ces lignes, j’ai deux envies. La première est de retrouver ce livre et le relire en « adulte » que je suis devenu. Mais surtout de vous inciter à le lire à votre tour. Il vous permettra certainement de vous changer les idées et de relativiser cette période de confinement, d’en en tirer les leçons et le moment venu, repartir plus fort, plus riche de l’expérience vécue…

Tiens, avec mon petit café du matin, je reprendrai bien une Madeleine, pas vous ?

Gil Depreter