Rencontre avec Laurent FACK, directeur général de l’Orchestre Royal de Chambre de Wallonie.

L’institution culturelle, la plus ancienne de la Ville et le plus ancien orchestre de Chambre a frôlé la faillite mais a trouvé le souffle nécéssaire pour imaginer de quoi sera fait son avenir. La sérénité, grâce à cette réactivité créative semble revenue. A vous de ne pas manquer les rendez-vous fixés, dont le premier concert avec le nouveau directeur musical de l’ORCW, Vahan Mardirossian, programmé le 23 octobre à Arsonic.

Le bouillonnant directeur général nous raconte sans tabou, comment, il a traversé l’épreuve, côté coulisses…

Quelles sont les premières dispositions que vous avez prises en tant que chef d’entreprise ?

Le 17 mars, le jour de l’annonce du Gouvernement fédéral, le personnel administratif a été mis au télétravail jusqu’à fin août, afin de préserver leur santé et celle de leurs familles.

Par suite des annulations massives des concerts et des fermetures des salles, les artistes ont été mis au chômage pour force majeure à la suite du Coronavirus du début avril jusqu’à mi-août. 

Les artistes qui n’avaient pas de contrats ont été aidés malgré des Lois et des interprétations qui changeaient toutes les semaines.  L’arrêté qui régissait le cadre législatif a été voté fin avril pour des artistes touchés début avril.  Nous vivions dans une insécurité juridique constante et continuellement changeante.  C’est encore le cas à la fin juillet.

L’ORCW compte 12 artistes dans son noyau ; pourtant, nous avons suivi 30 artistes, avec des solutions à la carte pour chaque situation qui différait. Nous faisons partie des institutions qui ont le plus suivi ses artistes : plus de 40% de l’équipe administrative a été immédiatement mobilisée, et cela pendant plusieurs mois, pour aider nos artistes.

Nous étions constamment en contact avec plusieurs Ministres de plusieurs Gouvernements qui nous ont apporté beaucoup d’aide, notamment la Ministre de la Culture (Bénédicte Linard), le Ministre-Président (Pierre-Yves Jéolet) de la Fédération Wallonie-Bruxelles, le Ministre du Budget du Gouvernement fédéral et plusieurs parlementaires (Isabelle Galant) ou Présidents de Parti (G-L Bouchez pour le Fédéral).

Ce fut plus délicat avec la Ministre CD&V de l’Emploi. Les flamands n’ont pas du tout notre culture ; ce qui rend les échanges incompréhensibles de part et d’autres.

Nous avons dû gérer l’annulation de 35 concerts sur 50 à réaliser sur base de notre contrat-programme avec l’Etat; ce qui ne nous empêche pas de monter 80 à 100 productions par an, grâce aux recettes propres, avec une subvention prévue pour 50 concerts.

Par la suite du Coronavirus, nous passerons de 100 concerts vendus à 65 concerts prestés.

Même des villes comme Binche annule en juin 2020 des concerts programmés en décembre 2020, pour un projet arrêté en janvier 2019 et négocié depuis 2018.

Nous avons perdu 200.000 EUR sur les 250.000 EUR de recettes propres : l’équivalent d’une belle maison ; une diminution de 80 % de nos recettes propres !

Nous avons juste évité la faillite de la plus ancienne institution culturelle de Mons, le plus ancien orchestre de chambre de Belgique, un des plus anciens en Europe…

 

 

Le réservoir de supports sonores et vidéo a t il été utilisé pour que l’ORCW reste visible aux yeux du public ?

15 captations de l’ORCW ont été diffusées 70 fois sur une dizaine de télévisions locales avec un effort particulier de Télé-MB et TV-Com.  La RTBF a refusé toute diffusion.

Ces captations sont faites sur nos fonds propres alors que nous aimerions consacrer ces moyens à des projets de créations artistiques. 

Nous devons financièrement palier aux désinvestissements structurels de la RTBF (TV) en la matière – La radio (Musiq’3) fait un excellent travail.  Malgré des plans « Restart » qui masque un désinvestissement structurel, la TV abandonne ses artistes de sa Communauté : leur diffusion est rare ou contextualisée dans un cadre particulier (ex. : le merveilleux Concours Reine Elisabeth) ou reléguée à des heures de faibles écoutes sur la Trois TV ou diffusée vers la TV à la demande (avec des pub ?). 

Tout cela ne nous permet pas de proposer les Arts à un large public et de développer l’émancipation culturelle qui fait partie des raisons premières de la dotation de la RTBF qui représente la moitié du budget de la Culture.

 

Après avoir “accusé le coup”, comment envisagez-vous la saison prochaine avec toutes les incertitudes actuelles ?

Avec la plus grande sérénité et sagesse.  C’est notre « ADN » de créer et donc de s’adapter. C’est dans notre « ADN » de (se) réinterpréter constamment.

Ce confinement nous a permis de travailler sur le futur : avec le nouveau Directeur musical de l’ORCW, Vahan Mardirossian, nous avons programmé et invité les artistes pour les deux prochaines saisons, jusqu’en juin 2022.

Nous avons négocié avec Télé-MB une émission mensuelle d’information sur l’ORCW et son nouveau Directeur musical, Vahan Mardirossian, avec une diffusion mensuelle de nos captations sur Télé-MB.

Ces mêmes projets seront proposés aux 12 télévisions locales.

 

 

Mons va rayonner… L’ORCW est de retour !

Avec le Bourgmestre de Mons (Nicolas Martin) et l’Echevine de la Culture et de l’Enseignement (Catherine Houdart), nous avons préparé :

– Notre retour avec trois nouveaux concerts gratuits :

– 29 août : Hôtel de Ville de Mons, avec Visit-Mons / Destination Mons,

– 12 septembre : Grands prés, une première en Belgique, un orchestre dans un centre commercial, avec son Directeur (Thomas Cornil, le neveu d’une célèbre pianiste belge),

– 2 octobre, CHU Ambroise Paré, avec son Directeur, Stéphane OLIVIER, sur une initiative propre au Bourgmestre, Nicolas Martin, MERCI au personnel soignant.

– Des projets futurs avec le pôle muséal (encore top secret), les écoles primaires, l’Académie de Mons (avec également sa directrice Ségolène Dutrieux et le Professeur d’Art de la parole, Lara Cowez – Musique et théâtre), les fêtes de Wallonie (17 septembre), Mons Cœur en Neige (avec La Gestion Centre-Ville, Hilele Henini et David Jeanmotte),…

– Des projets avec l’U-Mons (un blind test en musique classique), avec l’Athénée Royale de Mons (sa Directrice, Françoise Colinia) où tous les enfants de deuxième année assisteront à une répétition de l’ORCW.

– Miraculeusement, nous avons même réussi à monter de nouveaux projets pour ce second semestre 2020 : des concerts pour nos enfants, trois concerts à la Chapelle Musicale Reine Elisabeth, un concert au Parlement de la Communauté française pour la fête de cette institution, …

 

 

Quel est aujourd’hui votre première raison d’être optimiste ou d’être pessimiste ?

Nous avons tous besoin de Culture, d’Art comme un bien de première nécessité. 

Ce n’est pas vital mais bien indispensable. 

Dans une crise telle que le Coronavirus, le confinement, nous nous tournons vers l’Art, sous plusieurs formes, en fonction de nos affinités.